• Chapitre XX



    Émilie était apposée contre un arbre, en silence, elle réfléchissait. Camille l’avait accompagnée, mais n’osait pas troubler la réflexion de sa copine, préférant observer l’homme qui tentait désespérément de pêcher dans le lac. Émilie quant à elle fixait le sol sans vraiment le voir, son esprit était en guerre entre ses idées, ses craintes et ses suppositions, une véritable bataille psychique se déroulait dans la tête de la jeune fille. Cela faisait déjà de très longues minutes qu’elle était là à s’embrouiller dans ses pensées. Lorsque Émilie se redressa, Camilla se retourna vers elle, espérant que celle-ci allait se lever, c’était la troisième fois qu’elle agissait ainsi depuis qu’elles étaient toutes les deux venus contre cet arbre, mais Émilie resta assise. Camille finit par se tourner, d’une manière quelque peu agacée vers le pêcheur malchanceux. Au bout d’une dizaine de minutes, Émilie venait d’avoir une grande idée, elle se trouvait idiote de ne pas y avoir pensé auparavant, la jeune fille se leva tandis que son amie demanda en étirant ses bras et en baillant :
    « Qu’est-ce… que tu fais ? »
    Émilie se tourna vers elle quelque peu surprise avant de répondre :
    « Je vais aller voir Rachel, il faut que je lui demande un truc… et euh… merci d’être restée à côté de moi.
    -Ne t’en fais pas, par contre je vais t’attendre dans la caravane, il ne fait pas très chaud dehors.
    -Ok, à plus tard. »

    Émilie retrouva Rachel dans le même bâtiment que la veille, celle-ci était occupée de parler avec Céline d’une ferme abandonnée, lorsque Rachel vit Émilie arriver, elle interrompit la conversation et demanda à la jeune fille :
    « T’as besoin de quelque chose ? »
    La jeune femme rousse s’était retournée afin de voir à qui parlait Rachel, elle salua Émilie avec le sourire, la jeune fille répondit quelque peu gênée :
    « Cela peut attendre, s’il faut, je repasserai plus tard… »
    Rachel s’apprêta à répondre, mais Céline la devança, indiquant :
    « Tu vas pouvoir la recevoir, j’ai quelque chose à aller faire, je te retrouve plus tard. »
    La jeune femme adressa un clin d’œil à la jeune fille, Émilie la remercia d’un geste de la tête tandis que Rachel questionna Émilie :
    « Tu préfères que l’on aille dans mon bureau ? »
    Émilie affirma de la tête et suivit Rachel dans la petite pièce, la jeune femme l’invita à s’asseoir avant de faire de même sur le bureau puis elle indiqua :
    « J’ai su qu’il y a eu une dispute entre toi et Steve, j’imagine que c’est de ça que tu veux parler ? »
    Émilie répondit quelque peu gênée :
    « Euh… non pas vraiment… C’est à propos de ce que tu as dit sur Jordan hier…
    -Merde, je savais que je n’aurais pas dû vous parler de cela… »
    La jeune femme s’était donné un petit coup de poing dans la jambe, visiblement agacée contre elle-même, Émilie lui fit remarquer :
    « Non, non, tu as bien fait, je préfère savoir…
    -J’imagine bien, Émilie, seulement ce ne sont que des rumeurs, on est absolument sûr de rien du tout, ça ne valait pas la peine que je vous en parle si cela crée une dispute entre vous… »
    Rachel semblait désespérée, elle se frottait le front machinalement en fermant les yeux comme pour essayer de calmer un mal de tête. Émilie ne savait pas comment bien expliquer ce qu’elle était venue demander, elle hésita en demandant :
    « Est-ce que justement, il sera possible de… de vérifié si c’est vrai… enfin, je veux dire si Jordan est vraiment là-bas… »
    Rachel observa la jeune fille et se racla la gorge avant d’indiquer tristement :
    « Malheureusement, non, Émilie, j’aimerais que ce soit possible, mais c’est beaucoup trop dangereux d’infiltrer un tel camp pour vérifier si c’est vrai ou non. Mes collègues refuseront et je les comprends tout à fait… »
    Émilie répondit immédiatement :
    « Je suis prête à le faire moi !
    « Quoi ? De… mais non ! »
    Rachel avait été surprise par la réponse d’Émilie, elle rétorqua :
    « Émilie, c’est vraiment trop risqué. Je ne pense pas que Jordan aurait pu devenir un Relanceur, mais imaginons, juste un instant que ce soit le cas et que tu arrives à le découvrir, qu’est-ce que tu ferras ?
    -Je… ce… »
    Émilie s’imagina en face de son frère, découvrant qu’il était devenu un Relanceur, ce dernier baissait la tête comme s’il avait honte, Émilie le suppliait qu’il dénonce la supercherie, elle ne pouvait y croire. Bien qu’elle se fût imaginé pleurer, elle sentit que de véritables larmes commencèrent à couler sur ses joues, Rachel s’approcha de la jeune fille et la serra dans ses bras en lui disant d’un ton triste :
    « Je regrette Émilie, pour le moment, il n’y a rien qu’on ne puisse faire. »

    Après être sortie du bâtiment, Émilie se dirigea vers le lac, bien qu’elle sût que Camille l’attendait, elle avait envie d’être seul. La jeune fille finit par s’asseoir à la table sur laquelle elle avait déjeuné quelques heures auparavant. Elle s’y accouda et se tint la tête entre les mains tout en fermant les yeux, cela l’aida à se concentrer sur ses pensées. La jeune fille finit par s’endormir, elle rêva de son frère, cette fois-ci ce dernier pointait un fusil vers elle et s’apprêtait à tirer. Steve apparut aux côtés de Jordan, il avait également un fusil, mais le pointait sur la tête de Jordan tout en observant Émilie et annonça avec une voix horriblement déformée :
    « Tu vois… Je te l’avais dit… Il est devenu comme eux… JE TE L’AVAIS DIT… Il est l’un des leurs… C’est notre ennemi… L’un des leurs… il faut le tuer, il est devenu comme eux, je te l’avais dit, c’est l’un des leurs, il est devenu comme eux, il FAUT LE TUER ! »
    Émilie pleurait, suppliant Steve de se taire, en affirmant qu’il mentait mais ce dernier crier de plus en plus fort :
    « COMME EUX ! IL FAUT LE TUER ! C’EST L’UN DES LEURS ! JE TE L’AVAIS DIT ! IL FAUT LE TUER ! »
    Des bras obscurs sortirent du visage de Jordan et attrapèrent Émilie, celle-ci se débattait, bougeant ses bras dans tous les sens pour se défaire de l’emprise de ces bras maléfique. D’un coup, son visage fut éclaboussé et à l’instant même les bras disparurent, Émilie se tourna vers son frère, il se tenait la gorge tandis que du sang s’en écouler à une vitesse folle, le jeune homme s’indigna avec un fort écho :
    « Tu m’as tué ? Tu m’as TUÉ !
    -Non ! Non, ce n’est pas moi ! NON ! »
    Émilie nia avoir fait quoi que ce soit, mais elle se rendit compte d’un coup qu’elle tenait son poignard dans sa main et que la lame de ce dernier était ensanglantée. Immédiatement elle s’excusa :
    « Non ! Je ne voulais pas, c’était un accident ! Jordan, ne meurs pas, c’est un accident !
    -Moi aussi ça allait être un accident ? »
    Tom était apparu à côté de Jordan, son visage était craquelé, fissuré, il semblait de très mauvaise humeur. Émilie répondit en pleurant :
    « Non ! Je ne t’ai pas tué !
    -Tu es SÛRE ? »
    Le dernier mot qu’il hurla résonna tandis que Tom disparut, Jordan quant à lui s’effondra à terre, tandis que la flaque de sang qui l’entourait ne cesser de s’accroître. Émilie, voulu s’agenouiller à ses côtés mais une main blanchâtre la retenue, d’une voix fragile, presque en murmurant, Mathilde implora :
    « Qu’as-tu fait ? »
    Elle alla s’agenouiller auprès du corps de Jordan, ses longs cheveux cachaient son visage, mais Émilie entendait distinctement ses pleurs, la jeune fille voulue s’approcher de sa sœur pour la réconforter et s’excuse, mais lorsqu’elle s’avança Mathilde se tourna vers elle et hurla :
    « QU’AS-TU FAIS ? »
    Émilie chercha à s’excuser, elle supplia sa sœur de lui pardonner, mais les pleurs de cette dernière devenaient de plus en plus fort, jusqu’à devenir assourdissant.  Seule une voix arrivée à percer les cris, la voix ne cessait de répéter :
    « ili…. Eh ili… Émilie… ÉMILIE ! »

    La jeune fille se réveilla en sursaut, tandis qu’elle se sentait secouée et que quelqu’un l’appelait :
    « Émilie, oh, Émilie… »
    Tandis qu’elle se redressa et s’étira, ses bras étant endoloris après qu’elle eut dormi dessus, elle répondit avec une voix un peu étouffée :
    « C’est bon Jordan, je suis réveillée…
    -Jordan ? »
    Elle se frotta les yeux tout en s’excusant :
    « Euh… pardon, Benoît, désolé. »
    Le jeune garçon l’observait, il semblait inquiet et demanda :
    « Ça va ?
    -Pardon ? Euh, oui ça va… juste un mauvais rêve.
    -Mauvais au point qu’il te fasse pleurer apparemment. »
    Émilie ne comprit pas jusqu’à ce qu’elle touchât ses joues, elles étaient humides, la jeune fille remarqua également que la table était mouillée à l’endroit où elle s’était endormie. Benoît s’assit à ses côtés tout en demandant :
    « De ce que j’ai compris, Jordan, c’est ton frère ? »
    Émilie hocha la tête de manière affirmative tandis qu’elle bâillait, Benoît questionna de nouveau :
    « C’est de lui que tu viens de rêver ?
    -Je n’ai pas trop envie d’en parler…
    -Je peux comprendre… Moi-même je ne sais pas ce que devient Jonathan… »
    Émilie fut prise de surprise, elle se rendit compte qu’elle avait oublié que Jonathan avait disparu avant les événements et qu’il ne devait pas être informé de la présence de ses deux frères ici, s’il était encore en vie. La jeune fille demanda à son ami, avec l’espoir de trouver conseil :
    « Tu n’as pas envie de savoir ce qu’il devient ? Où il est et ce qu’il fait ?
    -Bien sûr que si Émilie, j’y pense régulièrement, mais d’un autre coté... »
    Benoît sembla se refermer sur lui-même, il détourna le regard et sa respiration se fit un peu plus forte. Émilie acheva pour lui :
    « Tu gardes espoir sur le fait qu’il soit encore en vie…
    - Voilà… »
    Le jeune garçon sécha les quelques larmes qui venaient de couler, Émilie lui indiquant alors :
    « Quant à mon frère, ils pensent l’avoir vu dans un camp de Relanceur…
    -Il a été fait prisonnier ? »
    Benoît avait demandé ça de manière effrayée, Émilie lui indiqua tristement :
    « Non, il semblerait qu’il soit devenu l’un de leurs chefs…
    -Oh… »
    Benoît sembla aussi attristé qu’Émilie, il indiqua sur un ton qui se voulait rassurant :
    « Si c’est le cas, au moins, il est en sécurité.
    -C’est impossible…
    -Quoi donc ?
    -Mon frère ! Il ne serait jamais devenu un Relanceur, il détestait cette guerre, c’est totalement impossible…
    -Dans ce cas, c’est peut-être pas lui, ils se sont peut-être trompés.
    -Et si c’est lui ? Et qu’il soit infiltré là-bas où je ne sais quoi…
    -Je ne sais pas quoi te dire Émilie…
    -Il faut que je sache… »
    Émilie se posait trop de question et elle savait qu’elle n’aurait pas l’esprit tranquille, elle se leva et se dirigea vers sa caravane, bien décidée à agir.


    « Tu es complètement folle, je t’interdis de faire ça ! »
    Camille suivait Émilie qui se dirigeait vers la caravane de Steve, la jeune fille venait d’expliquer à sa copine qu’elle avait décidé d’aller jusqu’au camp des Relanceurs afin de savoir, si oui ou non, son frère s’y trouvait. Camille avait d’abord pris cela à la rigolade, mais voyant qu’Émilie avait pris son poignard ainsi qu’un blouson, elle avait vite cherché à l’en dissuader, sans succès. Émilie lui fit remarquer de nouveau :
    «Je comprends que tu ne sois pas d’accord Camille, mais tant que je ne saurais pas, je n’arriverai pas à dormir »
    Elle toqua à la porte de son cousin tandis que Camille rétorqua :
    «Tu n’es pas obligée d’y aller, on peut demander à quelqu’un d’aller vérifier pour toi
    -J’ai déjà demandé cela, ils ne veulent pas…
    -Quoi ! Mais… Je t’en prie Émilie ne fais pas ça, je suis sûre que… »
    Camille s’interrompit lorsque Steve ouvrit la porte, il observa les deux jeunes filles et demanda quelque peu agacé :
    « Qu’est-ce que vous voulez ? »
    Camille y vit un espoir et râla à sa copine :
    « Vas-y dit lui ton projet, on verra s’il est d’accord…
    -Je n’ai pas besoin de son accord…
    -Qu’est-ce qui se passe ? »
    Steve sembla d’un coup plus inquiet, Émilie questionna :
    « Tu serais d’accord pour me donner ton fusil, vu que pour le moment tu en as plus besoin ?
    -Qu’as-tu prévu de f….
    -Elle veut aller dans le camp de Relanceurs pour aller retrouver son frère ! »
    Camille avait interrompu Steve, elle semblait folle de rage, Steve lui-même s’offusqua :
    « Quoi ! Mais il en est hors de question ! »
    Émilie indiqua calmement :
    « Tu peux m’accompagner si tu le veux, mais tu ne m’empêcheras pas d’y aller.
    « Écoutes-moi Émilie… Mathilde et Thomas vont arriver dans quelques jours, je ne vais pas les abandonner juste parce qu’il est possible que Jordan se trouve là-bas et tu ne nous abandonneras pas non plus.
    -Ce n’est pas à toi de décider ce que je dois faire ou non !
    -C’est ce qu’on verra, je vais aller voir Rachel et on verra ce qu’elle en pense.
    -Rachel non plus ne pourra pas m’empêcher d’y aller. »

    Steve avait foncé jusqu’au bâtiment d’accueil, derrière lui, Émilie le suivait agacée et Camille en faisait de même. Une fois à l’intérieur, le jeune homme avait crié afin que Rachel l’entende, celle-ci sortit paniquée de son bureau et demanda inquiète :
    « Qu’est-ce qui se passe ?
    -Il se passe qu’Émilie s’est mis dans la tête d’aller jusqu’au camp des Relanceurs pour savoir si son frère s’y trouve ou non, pourrais-tu s’il te plaît lui dire que c’est trop risqué et que c’est pour cela qu’on lui interdit d’aller là-bas. »
    Rachel sembla désemparée et répondit navrer :
    « Je regrette… »
    Steve sembla soulagé et fier jusqu’à ce que Rachel achevât sa phrase :
    « …Steve
    -Hein quoi ? »
    Le jeune homme fut perturbé, il semblait ne pas comprendre et rétorqua :
    « Quoi mais tu ne vas pas la laisser faire !
    -Steve, j’ai promis que je n’empêcherais personne de partir, alors si Émilie souhaite aller là-bas je vais p…
    -Mais pas à son âge, c’est qu’une enfant !
    -Je sais me débrouiller ! »
    Rachel et Steve se tournèrent vers Émilie, cette dernière était furieuse, mais tenta de garder un ton calme lorsqu’elle déclara :
    « Ce serait bien que tu arrêtes de me voir comme une enfant… moi aussi j’ai dû survivre à la guerre, moi aussi j’ai vu des choses horribles se passer sous mes yeux, moi aussi j’ai dû apprendre à me défendre. J’ai grandi à travers tout ça, j’ai toujours connu ça, le premier homme que j’ai dû tué, je l’ai fait quand j’avais cinq ans… Vous croyez vraiment que l’on est encore une enfant après ce genre de chose, que l’on est encore une enfant lorsqu’on nous apprends à viser la tête ou le cœur, lorsque l’on se réveille sans être sûre qu’au soir on va retourner se coucher…  Cela fait longtemps que je ne suis plus une enfant… J’ai dû faire face à tellement de choses que je ne pourrai jamais être une enfant… Si j’ai appris à survivre à tout cela, ce n’est pas toute seule, c’est grâce à toi Steve, grâce à Christophe, à Mathilde mais surtout grâce à Jordan… Alors tant pis si toi tu t’en fiches de lui, de savoir où il est et ce qu’il est devenu mais moi j’ai besoin de le savoir. Je préfère aller là-bas et prendre ce risque plutôt que de rester enfermée ici à attendre sagement, je comprends que tu veuilles rester ici pour Mathilde et votre bébé, je ne t’en veux pas, la seule chose que je te demande c’est de comprendre et de respecter ma décision… Je ne suis plus la petite Émilie, Steve, il serait temps que tu le comprennes. »
    Émilie s’était mise à pleurer en parlant, elle venait de dire tout ce qu’elle avait sur le cœur et cela la soulagée d’un grand poids. Steve ne paraissait pas indifférent à ce qu’il venait d’entendre, Camille pleurait également, visiblement touchée par ce témoignage. Steve indiqua d’une voix quelque peu étouffée :
    « Mais… Toute seule… »
    Quelques larmes se mirent à couler sur les joues du jeune homme, il s’agenouilla face à la jeune fille et sans dire un mot la serra dans ses bras. Émilie lui rendit son câlin, elle savait que partir n’allait pas être simple, mais ne s’était pas attendu à cela, les larmes se mirent à couler de plus belles sur ses joues. Camille indiqua d’une voix faible :
    « Je t’accompagnerai ma chérie… »
    Steve et Émilie relâchèrent leur étreinte et se tournèrent vers la jeune adolescente qui expliqua :
    « Je ne voulais pas te laisser partir, car je ne voulais pas te perdre, mais maintenant je comprends que c’est si je t’empêche d’y aller que je vais te perdre, je respecte ta décision et je t’accompagne. Je préfère risquer ma vie à tes côtés plutôt que de vivre seule en sécurité et je sais que ,pour rien au monde je ne te quitterais, que tu le veuilles ou non, je te suivrais »
    Camille semblait inquiète de la réaction d’Émilie mais cette dernière répondit avec le sourire :
    « On a dit qu’on voyagerait ensemble non ? »
    Les deux filles s’embrassèrent tandis que Rachel indiqua à Steve, tout en séchant ses larmes :
    « Je vais demander à Sandra et Céline de leur montrer le chemin et on leur fournira du matériel. »


    « Vous allez me manquer !
    -À moi aussi »
    Daniel et Maxime venaient d’apprendre que Camille et Émilie s’apprêtaient à partir. Les deux filles avaient annoncé leur projet au reste du groupe durant le repas du midi. Émilie répondit aux jeunes garçons :
    « Vous en faites pas pour nous, en revanche Daniel, je compte sur toi pour rester très sage et prudent, d’accord ?
    -Promis ! »
    Les deux jeunes garçons repartirent aussitôt courir l’un derrière l’autre autour du lac. Benoît, qui avait été enthousiaste à l’annonce des filles, leur avoua :
    « Je ne pourrai jamais prendre ce genre de décision et ce même si… »
    Camille sembla dubitative, mais Émilie savait de quoi il parlait, elle lui indiqua :
    « Si jamais j’apprends quoi que ce soit, je te le ferai savoir à notre retour.
    -Je te remercie, bon courage en tout cas… »
    De bruits de pas se firent entendre derrière les filles qui se retournèrent, Steve, Sandra et Céline s’approchaient. Steve tendit son fusil à Émilie tout en indiquant :
    «Tiens, je te le donne, c’est la moindre des choses que je puisse faire pour t’aider.
    -Entre toi qui m’offres un fusil et Jordan qui m’offre un poignard, vous avez des cadeaux bien étrange pour une soi-disant enfant…
    -Ah ah, c’est bon, j’ai compris, n’insiste pas trop là-dessus sinon je m’énerve de nouveau… »
    Tandis que Céline offrait un fusil à Camille, Émilie se rapprocha de Steve pour le serrer dans ses bras, elle lui chuchota :
    « Désolé de t’avoir insulté de con ce matin…
    -Ne t’en fais, c’était mérité, j’ai vraiment agi comme tel… Promets-moi d’être extrêmement prudente d’accord…
    -En échange promet moi de prendre soin de Mathilde et Thomas.
    -C’est promis.
    -C’est promis aussi. »
    Ils se redressèrent tous les deux et Céline annonça :
    « Tenez, voilà un sac avec quelques provisions, c’est un cadeau de Rachel, malheureusement elle ne peut pas venir vous dire au revoir, mais elle vous souhaite bon courage. Si vous êtes prêtes, on va pouvoir y aller. »
    Les deux filles saluèrent Benoit et Steve et suivirent les jeunes femmes qui se dirigèrent vers la forêt.

    Le soleil se couchait, donnant au ciel une couleur entre le rose et le violet, cela faisait plusieurs dizaines de minutes que Céline et Sandra avaient quitté les deux jeunes filles après les avoir aidées à traverser la forêt. Le vent commençait à souffler et l’air se rafraîchissait, les deux jeunes filles avaient avancé jusqu’à une petite maison de campagne faites de pierres grises, la moitié du toit était effondré, ce qui leur permit d’allumer un petit feu sans risquer d’être enfumé. Émilie s’y était assise en face, son fusil était posé au sol à côté d’elle, machinalement elle avait sorti son poignard et observa la lame à la lumière des flammes, elle pensait à son frère. Elle ignorait ce qui l’attendait là-bas, mais elle se sentait prête à y faire face si cela pouvait lui permettre de se sentir mieux. Camille revint, son fusil dans les bras et indiqua :
    « C’est vraiment très grand, à la vue des lumières, ils sont plusieurs et ont des véhicules, ça va pas être facile… »
    Émilie ne répondit pas tout de suite, perdue dans ses pensées, elle finit par se relever en demandant :
    « Tu peux surveiller le feu, je vais aller y jeter un coup d’œil.
    -D’accord mais prend ton fusil, je n’aime pas quand tu te balades sans… »
    Émilie céda et prit l’arme dans ses mains bien qu’elle préférât avoir son poignard, elle sortit de la bâtisse et grimpa le sommet de la colline qui se trouvait à une dizaine de minute de marche. Une fois au sommet, elle vit l’exploitation agricole qui se trouvait en contrebas à plusieurs dizaines de kilomètres de là. De nombreuses lumières étaient allumées, dévoilant les troupes de soldats qui s’y trouvaient, une trentaine d’hommes qui parcourait la zone extérieure entre la dizaine de bâtiments. Un véhicule tournait autour du complexe, avec à son bord trois personnes armées prêtent à faire feu au moindre intrus. Émilie ressentit de l’angoisse, elle était effrayée, mais n’avait aucune envie de faire demi-tour, elle repensa à tout ce qu’elle avait vécu depuis qu’elle avait quitté le centre hospitalier, de la principale raison qui l’avait poussée à faire cela, retrouver son frère. Maintenant qu’elle était plus proche que jamais, elle sentait en elle le besoin d’aller jusqu’au bout, qu’importe le danger, le risque d’être blessé ou de mourir, elle avait pris une décision et la tiendrait. Elle en avait marre de tout cela, pour elle, désormais il n’était plus question de se cacher, mais d’être libre, elle en avait marre de chercher à simplement survivre, ce qu’elle voulait, c’était vivre.

    FIN

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