• Chapitre III

    Chapitre III

     

    Émilie, inquiète, demanda immédiatement au jeune garçon :
    « Tu t’es blessé ?
    -Hein ? Non… 
    -Qu’est-ce que c’est que ça alors ? »
    Elle toucha l’endroit où se tenait la sombre tache sur le bras du jeune garçon, elle ressentit à la texture de la chose qu’il ne s’agissait pas de sang, c’était gluant. Elle s’essuya rapidement le doigt par dégoût, elle indiqua :
    « Non, ça va, cela doit être une vieille sauce, tu ferais mieux de te laver le bras »
    Le garçon s’exécuta en allant jusqu’à la mer, Émilie quant à elle s’allongea, elle était épuisée. Ils n’avaient pas encore mangé, mais elle n’avait pas le courage de chasser la mouette maintenant, elle espéra que Daniel n’avait pas trop faim. Lorsqu’elle le vit revenir et s’allonger, elle en conclut que non, rapidement elle s’endormit avec l’harmonie que produisaient les crépitements du feu.

    Ce fut une tout autre ambiance qui la réveilla le lendemain matin, les gouttes claquaient sur le sable déjà humide, la fraîcheur se fit sentir tandis qu’elle se leva. Elle ralluma rapidement le feu afin de se réchauffer, puis elle prit plusieurs bâtons de bois ainsi que son poignard et commença à en tailler un. Elle transforma l’une des extrémités en pointe piquante et fit une encoche sur l’autre, elle prépara une dizaine de pieux de cette façon. Daniel qui s’était levé entre-temps l’avait observé travailler, cela avait pris une grosse partie de la matinée à la jeune fille, elle espérait désormais que cela marcherait. Le jeune garçon lui tendit le petit arc, comme elle, il semblait impatient de voir ce que donnerait le premier essai. Tous deux sortirent sous la pluie, ils marchèrent un peu jusqu’à voir un oiseau sur le sable, encore une mouette. Émilie attrapa l’un des pieux et l’arma sur son arc, elle tendit la ficelle élastique et visa en respirant lentement, comme son frère lui avait appris pour tirer au fusil. Elle relâcha la ficelle et immédiatement le pieu partit en grande vitesse vers la mouette avant de tomber dans le sable près d’un mètre avant la cible. La mouette s’envola, tandis que la jeune fille alla récupérer le pieu dans le sable, elle avoua à Daniel :
    « Bon ce n’est pas génial, les piques ne vont pas bien droits, mais avec de l’entraînement, je devrai pouvoir y arriver. »
    La deuxième fois ne marcha pas mieux, la troisième non plus tout comme la quatrième, il fallut près d’une dizaine d’essais avant qu’elle ne touchât enfin une mouette. Cela ne tua pas l’animal pour autant, il eut juste son aile blessée, l’empêchant de s’envoler. Émilie courut vers l’animal qui courait en zigzaguant afin de l’achever.

    Comme pour célébrer cette victoire, la pluie avait cessé laissant place à une petite éclaircie dont le duo profita le temps de rentrer. Émilie prépara la mouette comme elle l’avait faite la vieille avant de la faire cuire. Même si cela était encore une fois fort salé, cela faisait du bien de manger et Émilie s’avouera son repas.

    Comme prévu, après leur repas, les deux jeunes se dirigèrent vers le magasin de pêche que la jeune fille avait repéré la veille. Émilie n’avait emporté que son poignard, laissant l’arc à sa place, elle espérait ne pas devoir s’en servir. Durant leur trajet, la pluie avait recommencé à tomber, la jeune fille était heureuse d’être arrivée devant le magasin. Elle n’eut pas besoin de forcer la porte, celle-ci n’étant pas verrouillée, ils rentrèrent rapidement afin d’être au sec. L’intérieur était rempli d’un nombre impressionnant de canne à pêche, de filet, de moulinet, au point qu’il était difficile de se déplacer sans rien faire tomber.  D’ailleurs, beaucoup d’objets étaient à terre, comme si l’endroit avait subi un tremblement de terre.

    Dans tout ce fouillis, Émilie ne savait pas trop ce qui pourrait lui être utile, elle n’avait encore jamais pêché, elle décida de prendre un filet, elle prit également deux K-way, celui qu’elle prit pour Daniel était trop grand, elle due donc découpée dedans pour l’adapter à sa taille. Ils continuèrent de fouiller sans chercher quoi que ce soit, d’un coup Daniel leva sa main d’un geste vif tout en hurlant :
    « Aie ! 
    -Qu’est-ce que tu as fait ? Tu t’es pris un hameçon dans les doigts ?
    -Non, quelque chose m’a coupé… »
    Il sortit alors un objet qu’Émilie n’aurait jamais pensé trouver ici, Daniel tenait dans ses mains un petit harpon. Émilie s’en approcha et saisit l’arme, elle semblait encore en bonne état, elle décida de la mettre dans son sac avec hâte de l’essayer. Puis elle se tourna vers le jeune garçon qui tenait sa main à la bouche, elle s’approcha calmement en lui demandant :
    « Fais-voir ta blessure… »
    Il s'était coupé au niveau de la paume, la jeune fille essaya de trouver quelque chose afin de recouvrir la coupure, elle ne trouva rien en dehors d’un vieux bout de Scotch collé sur un carton. Elle le prit et l’appliqua sur la main du jeune garçon en le rassura :
    « Voilà, ça va guérir assez vite, ne t’en fais pas.  On va pouvoir rentrer d’ailleurs. »
    Ils ressortirent après avoir enfilé leur manteau, le soleil commencé à se coucher, Émilie ne s’était pas rendu compte du temps qu’ils avaient mis dans le magasin. Lorsqu’ils arrivèrent à la plage, l’obscurité commençait à tomber, Émilie vit une mouette au loin, elle arrêta Daniel de la main :
    « Attends… »
    Elle sortit le harpon qu’elle avait ramassé et visa avec précision avant de le lancer de toutes ses forces. La tige métallique partit avec vitesse, de manière bien droite en faisant siffler l’air. La flèche blessa l’oiseau avant de se planter dans le sable, Émilie s’approcha de sa victime. Elle s’avança et acheva l’oiseau avant de ramasser le harpon.
    Elle prit le harpon dans sa main et tandis qu’elle nettoya l’arme, elle dit à Daniel avec le sourire :
    « Voilà qui va faciliter les choses, on va abandonner l’idée de l’arc pour le moment »
    Ce soir-là, ils mangèrent avant de s’endormir, Émilie continuait d’observer l’arme qu’elle tenait dans les mains.  Elle trouvait une certaine beauté à la tige métallique soigneusement taillée, elle songea alors à se fabriquer un arc elle-même plus grand et à se servir du harpon comme d’une flèche. Bien qu’elle doutât que cela puisse fonctionner, elle était prête à essayer, encore faudrait-il qu’elle puisse se construire un arc. Sur ces pensées, elle finit par s’endormir tandis que la pluie jouait sa triste mélodie.

    Dans les jours qui suivirent, Émilie et Daniel continuèrent de manger de la mouette, la jeune fille s’était améliorée au lancer du harpon, elle arrivait à y mettre plus de force qu’auparavant et à viser juste. Mais le duo commençait à en avoir marre de manger de la mouette, ils avaient tenté de jeter l’un des filets à la mer dans l’espoir de pêcher quelques poissons, mais cela n’avait pas marché. Émilie avait donc envie d’aller fouiller le supermarché qu’elle avait aperçu quelques jours plus tôt. Seulement, elle n’était pas sûre que Daniel fût prêt à une telle excursion, de plus ils étaient peu armés et ignoraient les risques. Le fait de ne manger que des mouettes n’était pas la seule raison, elle avait envie de bouger, car elle n’en pouvait plus de faire tous les jours la même chose. Elle avait, d’ailleurs, songé à partir vers la campagne, si elle trouvait une ferme abandonnée au milieu de champs dans lesquels elle pourrait planter des légumes, ce serait une bonne chose. De plus elle avait toujours espoir de retrouver son frère, bien qu’elle sût qu’il y avait peu de chances que cela se fasse. Elle y réfléchissait tous les jours et en rêver la nuit, cette idée devenait de plus en plus obsédante, bien qu’elle ignorât totalement, comment la mettre en œuvre.

      Un matin de grosse pluie, elle décida d’aller au niveau du supermarché afin d’observer les alentours depuis le sol, elle ne prit pas son k-way qui était jaune et donc facilement visible.  Elle était partie de bonne heure, avant que Daniel se réveille, elle ne voulait pas être suivie. Comme à son habitude lors de ses virées, elle s’était équipée de son poignard en cas de danger. Émilie avança à travers les rues avec prudence, au début elle ne rencontra personne comme les dernières fois, mais après un long moment de marche, elle dut se cacher.

    Elle avait vu une femme d’une trentaine d’années au loin qui marchait parmi les décombres de maisons. Elle paraissait très vieille avec ses cheveux sales et décoiffés, de plus une partie de ses vêtements était arrachée et elle marchait en boitant. La dame transportait un sac plastique qu’elle tenait des deux mains, comme si c’était la chose la plus précieuse au monde. D’un coup la dame s’arrêta comme si elle attendait quelque chose, elle observait devant elle bien que son regard semblât vide, puis elle tourna à l’angle et repartit lentement. Émilie se demanda ce que faisait cette dame, elle semblait perdue, pour autant la jeune fille décida de ne pas s’en approcher par prudence, néanmoins elle la suivie de loin afin de voir où elle allait. Plusieurs fois la dame s’arrêtait pour observer autour d’elle, ce n’était pas évident pour Émilie de la suivre sans se faire repérer, puis la dame repartait et la jeune fille suivait.

     Émilie suivit la dame une dizaine de minutes comme cela mais cette dernière semblait n’aller nulle part, elle était passée plusieurs fois au même endroit. Tandis qu’Émilie observait la dame depuis une ruelle, elle sentit une main s’appuyer sur son visage, l’empêchant de crier. L’homme qui retenait ses cris avait également bloqué son bras droit qu’elle arrivait à peine à bouger. Elle entendit son agresseur chantonner vicieusement :
    « Allons, allons, ne bouge pas comme ça ma jolie, on va s’amuser toi et moi. »
    L’homme avait glissé sa main sous le t-shirt d’Émilie et cherché à l’enlever, bien que la jeune fille se débattît en bougeant autant que possible. Sous l’effet de la panique, elle en avait oublié son poignard accroché à son pantalon, elle le saisit de sa main gauche, regarda derrière elle et le planta dans le ventre de son agresseur avant de le retirer. L’homme avait lâché prise, Émilie remit rapidement son t-shirt correctement avant de se retourner pour voir le visage de son agresseur. Un homme mince, chauve, dans la trentaine également, se tenait le ventre au niveau de la grosse tache de sang présente sur son bermuda blanc. L’homme s’était laissé tomber sur ses genoux sous l’effet de la douleur, il releva la tête afin d’observer Émilie et menaça :
    « T’es morte, salope, t’as compris t’es morte »
    Émilie le regarda droit dans les yeux, lui indiquant qu’elle n’avait pas peur de lui, mais il continua :
    « On va te retrouver, salope, tu ne pourras pas nous échapper et tu vas souffrir, crois-moi ! Oh oui, tu vas souffrir. Tu vas voir ce que c’est de…
    -TAIS-TOI !»
    Émilie trancha la gorge de l’homme pour l’achever et le faire taire, ne pouvant plus supporter d’entendre ses menaces, ce dernier tomba à terre dans une mare de sang. C’est alors que la dame qu’elle avait suivie jusque-là arriva et hurla en voyant le corps de l’homme :
    « Qu’as-tu fait ? Qu’as-tu fait ? »
    Elle s’agenouilla près du corps de l’homme, Émilie répondit simplement :
    « Il m’a agressé, je me suis défendu…je ne voulais pas le… »
    La dame observa la jeune fille et la menaça également :
    « Les Survivalistes te retrouveront, ça, tu peux me croire et tu payeras »
    La dame partit en courant, Émilie ne réagit pas tout de suite étant incertaine de ce qu’il venait de se passer, puis consciente du danger, elle prit la fuite en courant.

    Elle ne s’arrêta pas de courir, bien qu’elle eût rapidement un point de côté, lorsqu’elle aperçut enfin la plage, elle se rassura. Consciente qu’elle devait être couverte de sang, la jeune fille se lava rapidement dans la mer avant de rejoindre Daniel dans le tunnel. Ce dernier s’était réveillé depuis et avait allumé le feu, Émilie en profita pour se réchauffer et s’assise à côté sans parler. Elle se calma et se mit à réfléchir, elle pensa que personne ne l’avait suivie, elle et Daniel étaient donc en sécurité mais ce qui l’inquiétait le plus c’est que la femme avait vu son visage. Désormais les sorties en ville seraient plus dangereuses qu’auparavant, surtout si le groupe avait des armes à feu. Daniel qui n’avait encore rien dit jusque-là, râla sur Émilie :
    « Tu aurais pu me dire que tu partais, j’ai eu peur que tu m’aies abandonné »
    Émilie observa le jeune garçon qui avait encore les yeux humides dus à de récentes larmes, elle lui dit d’une voix douce :
    « Écoutes, c’est vrai que tu es très casse-pieds, que tu peux être agaçant, que t’es un boulet, que…
    -Arrête !
    -Mais je ne vais pas t’abandonner, je ne suis pas si cruelle que ça, tu peux en être certain »
    Daniel serra alors la jeune fille dans ses bras en la remerciant, c’est alors qu’il remarqua :
    « T’as du sang sur ton maillot ! »
    Émilie observa son t-shirt, effectivement quelques taches de sang étaient restées sur son maillot bien qu’elle l’avait plongée dans l’eau de mer plus tôt. Elle décida que cacher la vérité à Daniel ne servirait à rien, il valait mieux le mettre au courant de la situation, ainsi elle lui expliqua l’agression qu’elle avait subi. A la fin de ses explications, elle conclut :
    « Bref, il faudra doubler de vigilance pour nos excursions en ville. »
    Daniel demanda alors :
    « On pourrait utiliser les égouts ? Ces tunnels doivent mener quelques parts
    -Je ne pense pas, la plupart ont été bouchés après avoir été inondés il y a deux ans, le seul accès, c’est par la plage.
    -Comment tu sais qu’ils ont été inondés ? »
    Émilie soupira à ce souvenir, elle répondit tristement :
    « J’étais présente lors de l’inondation, c’est un vieil homme qui a provoqué volontairement l’inondation des égouts pour me sauver moi et ma famille, il s’est sacrifié pour nous. 
    -Oh…désolé
    -Pas grave, ne t’en fais pas. »
    Daniel cessa de poser des questions après cela, ce midi-là, ils ne mangèrent pas, Émilie avait préféré ne pas sortir chasser la mouette au cas où ceux qui lui en voulaient, seraient dans les parages.

    Mais le reste de la journée resta calme, Émilie était resté à l’entrée du tunnel dans l’après-midi afin de surveiller la plage, il n’y avait eu personne. Donc au soir elle sortit, armée de son harpon afin de se procurer leur dîner, avec la grosse pluie qui tombait, ce ne fut pas simple et elle mit plus de temps qu’habituellement. Finalement après un long moment passé sous la pluie, elle put rentrer et cuire la mouette qu’elle avait attrapée et préparée, elle commençait à en être dégoutée, mais elle se força à manger malgré tout. Il fallait absolument qu’elle trouve autre chose à manger, c’était désormais décidé, dès qu’elle le pouvait, elle se dirigerait vers la campagne. La ville était de toute façon devenue trop dangereuse désormais, de plus à la campagne elle pourrait faire pousser des légumes, ce qui varierait les repas. Le seul problème, c’est qu’elle ne savait pas comment y aller, la dernière fois elle était arrivée en ville par le train, mais ce dernier avait déraillé. Elle passa une partie de la nuit à réfléchir au moyen de se diriger vers la campagne, il lui semblait évident que traverser la ville à pied n’était pas envisageable, cela serait beaucoup trop dangereux. Elle finit par s’endormir sans avoir trouvé la solution à son problème. 

    Les prochains jours, Émilie ne sortit uniquement que pour chasser, bien que de temps à autre elle envoyât Daniel à sa place. Le jeune garçon mettait plus de temps, il avait du mal à lancer le harpon, mais Émilie insista pour qu’il s’entraîne. Le reste du temps, le duo restait caché dans leur tunnel, ils discutaient ou dormaient, parfois Émilie restait plusieurs heures à regarder la mer au loin, observant la danse somptueuse et déchaînée des vagues. Le vent et la pluie jouaient une triste mélodie qui couvrait les habituels bruits de tir, qui se faisaient entendre au loin par moments.

     Après de longues journées calmes et ennuyeuses, Émilie en eut assez et décida, un matin, de s’aventurer de nouveau en ville, mais évita de retourner vers le supermarché. Elle préféra longer la plage de longues minutes avant de s’approcher des petits immeubles qui dominaient la côte. Elle pénétra dans le premier d’entre eux, qui était coloré en une sorte d’orange abricot, l’intérieur était mal éclairé, mais elle voyait distinctement malgré cela. La jeune fille entra dans l’un des appartements qui donnait une vue sur la plage et commença à fouiller comme à l’ancienne. Elle avait fouillé trois appartements sans rien trouver d’utile ou de consommable, elle démarra la fouille du quatrième, qui se trouvait comme les autres au rez-de-chaussée. Elle commença par la chambre qui était en général la pièce la plus rapide, il n’y avait rien dans l’armoire, en dehors d’une paire de vieilles chaussettes trouées, une petite chaînette dorée et des chaussures abîmées. Elle voulut fouiller la table de chevet, mais le tiroir de celle-ci sembla coincé, elle tira avec force d’un coup sec dessus, ce qui l’ouvra violemment en faisant s’envoler une petite boîte noire, qui retomba sur le sol.

    Dans la petite boîte, qui s’était ouverte en retombant, se trouvait une bague avec un joli diamant dessus. L’objet, souvenir d’une histoire d’amour qui n’avait pas continué comme il aurait fallu, était encore en parfait état. Émilie la prit entre ses doigts pour l’admirer plus de façon plus détaillée, à l’intérieur de l’anneau était gravé :
    « À toi ma belle Hélène »
    La jeune fille remis l’alliance délicatement dans son coffret, et reposa ce dernier proprement dans le tiroir. Elle avait un pincement au cœur à l’idée qu’un homme n’avait pas eu le temps de s’unir correctement avec la femme qu’il aimait. Elle fouilla le reste des appartements, mais ne trouva pratiquement rien, comme elle s’y attendait un peu, la seule chose qu’elle avait récupérée était une veste à capuche noire, qui serait parfaite pour les moments où il fera froid.

    Elle allait ressortir lorsqu’elle entendit un tir non loin, elle se cacha immédiatement bien que le tir n’eût pas été fait dans sa direction. Elle vit deux soldats Résistants qui venaient de tourner dans la rue où elle se trouvait, l’un d’eux semblait avoir tiré sur un animal errant, une sorte de gros rat noir que l’autre poussa du pied dans la rigole du trottoir. Les deux soldats continuèrent d’avancer, tout en discutant à voix basse, Émilie entendit leur conversation au fur et à mesure que les deux hommes approchèrent de l’appartement où elle était cachée. Elle écouta attentivement :
    « …C’est là qu’il a découvert le cadavre, il était bouffé par des rats.
    - Arg… Je ne préfère même pas imaginer l’odeur que ça devait avoir.
    -Bah Sylvain m’a dit qu’il a dû sortir pour vomir… M’enfin, ça reste une victoire pour nous.
    -Les Vautours ne cessent de perdre du terrain, c’est plutôt une bonne chose
    -C’est sûr, en revanche, je ne sais pas si t’as entendu parler des Survivalistes ?
    -Survivalistes ? Non, ça ne me dit rien…
    -Apparemment ce sont des sortes de psychopathes, ils cherchent à tuer absolument tout le monde sans savoir de quel clan sont leurs victimes, des décérébrés qui veulent anéantir la population humaine la jugeant mauvaise.
    -Des sortes de hippies hardcore ?
    -Plaisantes pas, ils sont de plus en plus nombreux, il paraît, même que certains d’entre eux sont bien armés. Comme si on n’avait pas assez d’ennemis avec les Vautours… »
    Émilie partagea cette pensée funeste, si une nouvelle armée tout aussi dangereuse que les vautours, voir plus, avait fait son apparition, ce n’était pas une bonne nouvelle. Elle écouta la conversation plus attentivement lorsqu’elle entendit :
    « T’as su ce qui s’était passé d’ailleurs au centre d’accueil ?
    -L’ancien hôpital ?
    -Ouais…
    -Je sais qu’il y a eu du mouvement par là mais sans plus.
    -Il y a eu un enlèvement.
    -Tu déconnes !
    -Nan, je te jure ! Une jeune fille qui aurait apparemment kidnappé un jeune garçon de ce que j’ai entendu. Il y a une récompense pour celui qui les ramènera là-bas. La jeune fille est brune, cheveux courts et yeux vert et le garçon blond aux yeux bleus.
    -Mais ils sont sûrs que c’est un enlèvement ?
    -La mère du garçon a dit que la jeune fille passait beaucoup de temps avec son fils et que leur relation était très étrange.
    -Et la fille n’avait pas de famille là-bas ?
    -Si, une jeune mère, qui est sa sœur, et son mari qui s’est engagé récemment. La mère est placée sous surveillance au cas où elle serait contactée par sa sœur.
    -Eh ben… Probablement une histoire de jalousie, ça encore…
    -En tout cas si on la voit, on n’hésite pas à la ramener !
    -C’est clair, surtout que ça me ferait du bien, en ce moment je supporte plus de… »
    Émilie n’écouta pas le reste de la conversation.

    Elle était sous le choc, on pensait qu’elle était la ravisseuse de Daniel et elle était recherchée. Elle s’assit à terre et observa le sol, perdue dans ses pensées après ce qu’elle venait d’entendre. Sa sœur était placée sous surveillance, elle ne préféra même pas imaginer comment cette dernière était traitée désormais. Tout cela par sa faute, à cause de sa décision stupide, de son geste égoïste, Émilie s’en voulait. En colère contre elle-même, elle craqua et se mit à pleurer, elle n’avait jamais voulu cela, mais il était trop tard. Elle se demanda s’il n’était pas mieux qu’elle aille se rendre afin d’expliquer toute l’histoire et libérer sa sœur de son fardeau, mais elle se doutait bien qu’on ne la croirait pas et qu’elle subirait des représailles. Elle essuya ses larmes, il fallait qu’elle tienne le choc, elle devait au moins ça à sa sœur, hors de question de baisser les bras. La guerre se faisait maintenant entre trois armées, une triade infernale et dangereuse qui menait un combat sans fin, Émilie, elle, se retrouvait désormais seule, au centre du triangle mortel.

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